Une série de mystères
Première partie
La livraison d’un colis longtemps attendu
par J. J. (Joe) Healy, Surintendant de la GRC (retraité)
dont les noms seront bientôt révélés
"1er janvier 1931 - 22 février 2011
Jack connaît maintenant le secret d’une grande énigme canadienne
Trois coups rapides, soudains et secs, et je bondis vers la porte d’entrée. J’attendais un colis d’Air Canada. Au fil des ans, la rapidité de mes sprints dans la maison n’a cessé d’étonner ma femme; en fait, elle a même réussi à calculer leur vitesse lorsqu’il est question de tarte au citron. J’ai fracassé tous les records.
En ouvrant la porte, je suis surpris de voir le facteur s’éloigner même si j’ai réagi immédiatement à ses coups. Il venait de quitter le perron d’un pas rapide et s’apprêtait à s’installer à bord du fourgon postal garé dans la rue. Le colis avait une très grande importance pour moi et je l’attendais depuis longtemps. Au cours des douze derniers mois, il m’est souvent arrivé d’en perdre le sommeil et mon humeur s’en était ressentie. Ma femme peut en témoigner. Le colis avait fait un long voyage.
«Je suis là, je suis là » lui ai-je crié. Le facteur, sur le point de s’installer au volant, s’arrête net et reste figé un court instant, comme surpris par le son de ma voix. Je me suis dit qu’il était peut-être pressé.
Je suis un peu mal à l’aise de le retarder. Mais il sort du fourgon et reprend le chemin de la maison. Il fait quelques pas, s’arrête au bas des marches et, sans le moindre avertissement, me lance le colis. Cela me prend au dépourvu. J’en suis stupéfait. Je suis euphorique et irrité à la fois. D’une part, je me réjouis d’avoir enfin ce colis extraordinaire dont on m’avait annoncé l’arrivée. D’autre part, je suis furieux de la désinvolture avec laquelle il m’est remis. L’attitude du facteur me déplaît. Ma femme collectionne des pièces de cristal Waterford – que serait-il arrivé si le colis avait contenu ces délicates porcelaines irlandaises?
Ce jour-là, je n’avais pas projeté de jouer au football avec le facteur. C’était une journée très spéciale. C’était la veille de mon dixième anniversaire de retraité de la GRC. Et si le colis m’avait glissé des mains, je m’en serais voulu jusqu’à la fin de mes jours. Et s’il avait été destiné à ma femme, elle aussi aurait été amèrement déçue. Chaque pièce de porcelaine Waterford est unique. Qui n’aime pas déguster un bon vin dans du Waterford?
À Ottawa, le ciel était nuageux et sombre. Nous étions le 25 janvier 2011. Le perron était recouvert de neige et je me tenais en pantoufles dans l’étroite embrasure de la porte. J’ai été pris par surprise quand le facteur s’est approché, et j’étais loin de m’attendre à ce qu’un missile postal me soit lancé. À cause de la neige, je ne pouvais m’avancer davantage. Je n’aurais pas hésité à enfiler mes bottes d’hiver et à attendre sur le perron, si j’avais su que j’aurais eu à attraper cette passe du facteur.
Mais d’où je me tenais, je réussis à saisir le colis au vol même si douze pieds environ me séparaient du facteur, planté là au bas des marches.
Ma femme et moi aimons célébrer les anniversaires de famille, et elle profite de toutes les occasions pour me faire des surprises. Elle avait mentionné qu’elle fêterait le dixième anniversaire de ma retraite. Nous avions pensé à un dîner à notre restaurant préféré. Il lui était aussi déjà arrivé de faire venir des présents par la poste. Land’s End fait la livraison. J’ai pensé à une Rolex. Après tout, j’ai plein de balles de golf et de tees.
Le colis solidement en mains, je rentre dans la maison. Je vérifie l’adresse inscrite sur le paquet et l’adresse de retour. Je reconnais le nom de l’expéditeur et remercie le ciel d’avoir rendu le colis à bon port. Mon expérience de receveur éloigné de football m’avait aujourd’hui bien servi. Le colis méritait d’être traité avec respect et dignité. Je l’attendais depuis très longtemps. Je voulais appeler ma femme. Je voulais appeler la personne qui me l’avait envoyé. Elle aussi serait heureuse. Je ne pouvais l’ouvrir maintenant. Il fallait que je le place dans un endroit sûr. J’étais rempli de joie, ému d’avoir enfin le colis entre les mains.
Le facteur ne m’avait pas vexé délibérément. Il était simplement pressé. Comme il s’éloignait, je me suis dit que jamais il n’aurait pu deviner ce que contenait le colis. Mais ma femme, elle, le pourrait. C’était fragile.
C’était un secret que peu connaissaient. Nous avions enfin une excellente raison de célébrer mon anniversaire. Pour être à même de comprendre l’importance du colis, son rapport avec cet anniversaire et avec l’histoire de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), il faut revenir quelque quatre-vingts ans en arrière et commencer par le commencement…
Fin de la première partieCette série comprend sept épisodes.
La deuxième partie : « Mes idoles de mon passé » paraîtra le 23 mars 2011
J. J. (Joe) Healy
Reg.#23685
Le 23 février 2011